Le Monde a changé... Je le vois dans l'eau, je le ressens dans la terre, je le sens dans l'air. Beaucoup de ce qui existait jadis est perdu, car aucun de ceux qui vivent aujourd'hui ne s'en souvient...
La cité de Châlons-en-Champagne est souvent comparée au Mordor de Tolkien : "Le jour reparaissait dans le monde extérieur, et loin au-delà de l'obscurité [de Châlons], le Soleil montait au-dessus de l'horizon oriental (...) ; mais ici, tout était plus sombre que la nuit. Les feux de l'IUFM s'éteignirent peu à peu. Le rayonnement disparut des escarpements. Le vent d'est qui soufflait depuis le départ de l'hôtel parut alors complètement tombé. Lentement, péniblement, les CAPESiens descendirent à tâtons, trébuchant, jouant des pieds et des mains parmi les rochers, les ronces et le bois mort, à l'aveuglette dans les ombres, plus bas, toujours plus bas, jusqu'à ne pouvoir aller plus loin. Ils finirent par s'arrêter; et ils s'assirent côte à côte, le dos contre un gros bloc de pierre. Tous deux transpiraient abondamment. - Si le Président du Jury géographe en personne m'offrait un verre d'eau, je lui serrerais la main, dit un des deux compères. - Ne dis pas pareilles choses ! répliqua le second CAPESien, (...) qui prit alors la tête, en direction du nord, pour autant qu'il pouvait le deviner [ndlr : de toute façon, le Nord, selon comme on est tourné ça change tout !]". Soudain se dressait devant eux la forteresse IUFMesque, plus terrifiante que jamais. En l'apercevant, le Grand Guius se sentit soudain paralysé.
J.R.R. Tolkien, Le Seigneur des Anneaux, Le Retour du Roi, Livre VI, Le pays de l'ombre, trad. 1973.
Caché dans son IUFM, le Président du Jury voit tout ; son regard perce les nuages, les ombres, la terre et... la chair...
Autre lieu de torture (pour la leçon de géo si le tirage au sort vous a attribué l'hérésie, mais aussi pour l'épreuve d'ESD tant redoutée...) : le lycée Oehmichen (et depuis cette année, je sais l'écrire sans regarder sur Google. Mais c'est parce que je commence à être habitué...)
Mais, me direz-vous : "Pourquoi n'avoir pris que des photos moches, sur lesquelles on ne voit rien ?" Eh bien je vous répondrai que j'avais prévu d'en faire plein d'autres, après avoir pénétré dans l'Antre de la Bête. Les photos ci-dessus, prises derrière une barrière, étaient censées renforcer l'aspect diabolique du lieu (bon, ok, ça a foiré.) Mais le choc psychologique lié à mes oraux a été si important, qu'une fois sorti, vivant mais titubant, je n'ai songé qu'à fuir... Heureusement, rappelez-vous qu'il existe pour Oehmichen une vidéo vous montrant les coulisses du CAPES 2010.
L'IUFM est cependant bien plus terrifiant. Quand vous consultez la bibliographie affichée sur les murs dans le couloir, si vous vous retournez, vous apercevez un monument aux morts (en l'honneur des CAPESiens tombés les années passées)... L'atmosphère est pesante dans toutes les salles, tous les couloirs, tous les escaliers que l'on vous fait interminablement monter, puis descendre, pour retourner à la bibliothèque, quand vous êtes déjà sur le point de vous suicider parce que vous n'avez même pas compris l'intitulé de votre sujet.
L'IUFM, c'est une ambiance particulière. Vous êtes entouré de concurrents (concours oblige), mais ceux-ci deviennent peu à peu vos amis, puisqu'en bon looser que vous êtes, vous êtes rassuré de constater que vous n'êtes pas le seul à aller en Mordor pour la troisième fois. Vous reconnaissez des visages ; vous demandez des nouvelles des gens absents ("Il l'a eu ?? Ah non, il est devenu alcoolique entre-temps...").
Et puis vous êtes compatissant. Vous pensiez être le plus malchanceux en tirant votre sujet... Puis vous voyez des filles pleurer et/ou s'évanouir en salle de préparation...
Mais avant tout cela, il y a eu la "visite de la bibliothèque" la veille. Parlons-en... C'est peut-être le PIRE moment du CAPESien. Vous voyez des livres horribles, qui sont donc logiquement censés être utilisés pour des sujets tout aussi horribles. Oh, chouette, il y a au moins 10 livres sur l'histoire de la musique, youpi ! Oh ben super, y'a une bio sur un bonhomme que je ne connais même pas ! ...
Et puis il y a la salle de tirage... C'est là que tout se joue, que tout peut basculer, d'un côté comme de l'autre. C'est là que tous les candidats prennent une mine dépitée... mine qu'ils garderont jusqu'à leur arrivée devant les bouchers en salle de passage...
Mon arrivée devant la salle de passage, parlons-en aussi : les premiers mots d'une candidate sortant de la salle d'à côté : "Mais ils sont fouuus !! Plus jamais je ne remets les pieds ici !!" (On dit tous ça la première fois !) Bref, ça mettait dans l'ambiance, et en tout cas, elle n'avait pas tout à fait tort : une heure après, je ressortais, la pression était retombée : c'était l'occasion de se sentir soulagé, mais surtout vidé... "Une année est encore passée, et a priori, je n'ai encore rien pu en retirer..."
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